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Détectabilité de la couche D"

Comment la cinétique de la transition Pv-pPv peut permettre de contraindre l'épaisseur de la couche D", la température ou encore la taille de grain dans la couche D" ?

Stéphanie Durand du LGL-TPE est co-auteure d'un article publié dans Nature Communications
https://www.nature.com/articles/s41467-019-13482-x

Kinetics and detectability of the bridgmanite to post-perovskite transformation in the Earth's D″ layer. Cinétique et détectabilité de la transformation de la bridgmanite en post-pérovskite dans la couche D" de la Terre.

C. Langrand, D. Andrault, S. Durand, Z. Konôpkova, N. Hilairet, C. Thomas, S. Merkel,
Nature Communications 10, 5680, 10 Décembre 2019

 

Voici un résumé de l'article par Stéphanie, l'abstract est dans l'article de Nature :

Les cents premiers kilomètres au-dessus de la limite manteau-noyau caractérisent ce que l’on appelle la couche D’’. La couche D’’ peut être détectée car des ondes sismiques se réfléchissent à sa surface. Elle est généralement interprétée comme la présence d’une transition de phase du minéral dominant dans le manteau inférieur, la Bridgmanite, de la structure pérovskite (Pv) à la structure post-pérovskite (pPv). Cette transformation affecte les propriétés physiques de la Bridgmanite permettant d’expliquer certaines observations en sismologie. Cependant, les mécanismes en jeu lors de cette transition sont mal contraints et nous avons peu d’information sur sa cinétique. Ce sont, pourtant, des paramètres clefs contrôlant la dynamique du manteau profond. De plus, même si la plupart des observations sismiques s’accordent avec la présence d’une transition Pv-pPv, certaines restent inexpliquées, comme par exemple certains contrastes de vitesse rapportés, plus larges que ceux prédits pour la transition Pv-pPv.  Enfin, la réflectivité et la polarité des signaux sismiques pourraient fournir des contraintes additionnelles mais leur interprétation nécessite une meilleure compréhension de la transition de phase Pv-pPv. Des données expérimentales sont donc nécessaires pour mieux exploiter et interpréter les données sismiques.

Dans cette étude, des collègues de l’UMET, Lille, ont mené des expériences à haute pression et haute température sur une enclume à diamants chauffée par un laser permettant de suivre la cinétique de la transition de phase d’une Pv (Mg0.86Fe0.14)SiO3 (Fig 1). Nous utilisons ces résultats pour comprendre comment la cinétique et l’épaisseur de la transition de phase affectent la détectabilité de la couche D’’ (Fig 2). Nous montrons que dans le cas d’une transition de phase « épaisse », c’est-à-dire avec une large zone où coexistent Pv-pPv, cela aurait tendance à augmenter la réflectivité de la transition, et ce quelle que soit la cinétique de la transition. Ce résultat dépend aussi de la fréquence des ondes sismiques. Ces calculs montrent que des observations sismiques plus complètes de la réflectivité de la couche D’’ pourraient permettre de mieux contraindre les caractéristiques de manteau profond telles que l’épaisseur de la zone de coexistence Pv-pPv, la température ou encore la taille de grain.

Fig 1 : Transformation de phase en fonction du temps. Proportions de poids de pPv mesurées en fonction du temps à (a) 1600 K, 1700 K, 1850 K et 129,5 GPa et (b) 1950 K, 2100 K, 2400 K et 126,0 GPa. Les symboles sont des données extraites des raffinements de Rietveld. Les lignes pleines correspondent au modèle Avrami (tableau 1). Encarts : incertitudes représentatives de ± 1σ sur les données expérimentales.

Fig 2 : Modèles de réflexions sismiques. Coefficients de réflexion pour les ondes P (a - d) et SH (e - h) ayant une incidence verticale sur une interface Pv-pPv. La figure montre les coefficients de réflexion en fonction de la fréquence de l'onde incidente pour six temps caractéristiques de transformation compris entre 0.1 et 10000 s. (a, e) Pour une frontière infiniment nette. (b, f) Une zone de coexistence Pv-pPv de 10 km. (c, g) Une zone de coexistence Pv-pPv de 50 km. (d, h) Une zone de coexistence Pv-pPv de 100 km. Pour une frontière nette, les coefficients de réflexion sont respectivement de 0,5 et 3,5% pour les ondes P et SH. Pour une zone de coexistence Pv-pPv plus épaisse, les coefficients de réflexion peuvent être augmentés ou réduits en fonction de la cinétique de transformation. La dépendance fréquentielle des coefficients  réflexions (par exemple> 3%) pourrait être utilisée pour contraindre l'épaisseur de la couche de coexistence Pv-pPv.

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